12 décembre, Journée internationale de la couverture sanitaire universelle, ou CSU. Si la CSU représente la situation où toutes les personnes peuvent avoir accès à tous les services de santé dont elles ont besoin sans se heurter à des difficultés financières au moment de les payer, nous en sommes encore loin. Aujourd’hui, près d’un milliard de personnes n’ont pas accès aux services de santé de base et plus de 100 millions de personnes basculent chaque année dans la pauvreté en payant les soins de santé dont elles ont besoin. La majorité du total des dépenses de santé des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire ne provient pas de l’Etat, ni même des bailleurs internationaux, mais directement des particuliers et des familles qui déboursent de leur poche les frais nécessaires au moment des soins.
Face à l’ampleur de ces besoins, la communauté internationale s’est mobilisée, notamment à travers l’adoption des Objectifs de développement durable (ODD) qui font de la CSU l’une des cibles de l’ODD 3 visant à « permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge ». L’intégration de cette cible permet d’envisager une approche globale, cohérente et intégrée de la santé, au-delà de l’approche cloisonnée de la lutte contre les maladies spécifiques qui contribue à la fragmentation de la structure mondiale de la santé.
Cette année, la Journée internationale de la CSU est marquée par la réunion à Genève du Comité directeur de transition pour la mise en place du Partenariat international de santé pour la CSU 2030. Ce partenariat s’inscrit directement dans la vision globale et intégrée de la santé et de ses systèmes prônée par l’ODD 3. Il découle de l’élargissement du mandat de l’IHP+ (International Health Partnership) au soutien d’un mouvement pour des progrès accélérés, équitables et durables vers la CSU et vers les autres cibles de santé des ODD, notamment la sécurité sanitaire et l’équité.
Ses objectifs sont donc les suivants :
- améliorer la coordination des activités pour le renforcement des systèmes de santé (RSS) et la CSU au niveau international ;
- renforcer le dialogue politique et la coordination pluripartites des activités de RSS dans les pays ;
- faciliter la redevabilité quant aux progrès accomplis vers le RSS et la CSU ;
- consolider la dynamique politique autour d’une vision mondiale partagée du RSS pour la CSU et plaider en faveur d’une allocation de ressources suffisantes, appropriées et bien coordonnées au RSS.
Lors des réunions qui se tiendront à Genève le 12 et 13 décembre, les partenariats, les réseaux et les initiatives engagés dans les systèmes de santé travailleront notamment à identifier les rôles de chacun ainsi que les liens et les passerelles à construire pour mieux coordonner l’action globale. L’accent sera également mis sur les actions nationales en faveur du renforcement des systèmes de santé et sur l’importance du partage d’une vision commune du RSS afin que les initiatives mondiales puissent appuyer les pays dans leurs actions de manière cohérente.
Cette année est également marquée par la grande mobilisation de la communauté internationale de la santé mondiale pour que les ODD mesurent réellement les progrès de l’accès à la santé des populations les plus pauvres. En effet, grâce à six mois de mobilisation, les experts en charge de l’élaboration des indicateurs de chaque cible de l’Agenda 2030 ont amélioré l’indicateur de la CSU. Grâce aux ODD, nous pourrons donc connaître l’appauvrissement des foyers en raison des dépenses de santé, et ainsi mesurer les progrès de la protection contre le risque financier.
La France a fait de la CSU l’une des priorités de sa politique internationale de santé et le gouvernement a d’ailleurs reconnu l’importance et l’efficacité du soutien et du renforcement des systèmes de santé (RSS) lors du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement qui s’est tenu le 30 novembre. Malgré cet engagement politique, elle accorde une partie infime de son aide publique au développement au RSS – par exemple l’Initiative Santé Solidarité Sahel (I3S), l’engagement phare de la France en la matière, ne représente que 30 millions d’euros entre 2013 et 2019.
De même, si elle a été l’un des partenaires d’IHP+ depuis ses débuts en 2007, la France n’a pas été particulièrement active en son sein. L’élargissement du mandat du Partenariat est l’occasion de renouveler son engagement pour la CSU et pour le RSS en signant le Pacte Mondial pour IHP pour la CSU 2030. La France doit s’impliquer à haut niveau dans les objectifs du partenariat et s’engager à être un partenaire actif de la collaboration en faveur du renforcement des systèmes de santé. Ainsi, s’il est impératif qu’elle continue sa mobilisation pour le financement de la santé mondiale en tant que principale donatrice, il est tout aussi important qu’elle participe également au soutien de la mobilisation des ressources domestiques pour la santé dans les pays à revenus faible et intermédiaire afin de réduire le poids des paiements directs pour les individus. Elle peut notamment offrir son appui concernant les réformes fiscales et soutenir au niveau international une meilleure cohérence des politiques commerciales et de lutte contre l’évasion fiscale.
Dans les semaines qui viennent, la France doit donc se saisir de l’opportunité créée par le Partenariat international de santé pour la CSU 2030 et s’engager politiquement et financièrement pour que la CSU et le RSS soient effectivement des priorités de sa politique internationale de santé.